Pour le 8 mars, Sciences Po rebaptise deux amphis

Ce jeudi 8 mars, jour de la Journée internationale des droits des femmes, sera donc à marquer d’une pierre blanche. L’administration de Sciences Po a en effet publié la lettre mensuelle de mars concernant l’égalité femmes/hommes. À travers cette lettre, et pour marquer l’importance de l’évènement, Frédéric Mion, le directeur de notre institution, a fait une annonce importante. Deux amphithéâtres vont être rebaptisés, afin de rendre hommage à deux femmes ayant traversé la vie du 27, rue Saint-Guillaume.

L’amphithéâtre Caquot va désormais porter le nom de Simone Veil.

Un amphi Simone Veil au 28, et Jeannie de Clarens au 27

Simone Veil, issue de la promotion 1948, remplacera le nom de Caquot pour l’amphithéâtre du 28, rue des Saint Pères. L’ancienne académicienne et ministre de la Santé, décédée l’année dernière, a intégré l’institut d’études politiques de Paris quelques mois après son retour des camps de la mort. Sciences Po lui a déjà rendu un hommage appuyé en juin dernier, en donnant, entre autres, son nom à la promotion 2022. Cela faisait suite à une démarche menée par certains nouveaux élèves qui, tout juste admis, qui avaient lancé une pétition recueillant plus de 200 signatures.

Frédéric Mion a également tenu à souligner le parcours de Jeannie de Clarens, dont le nom sera désormais celui de l’amphithéâtre A11 de l’historique 27, rue Saint Guillaume. Son investissement au sein de la Résistance et du Réseau Alliance durant la Seconde Guerre mondiale fut salué par les autorités alliées – elle apporta de précieuses informations sur les fusées allemande V1 et V2. Diplômée de Sciences Po en 1940, elle contribua selon Frédéric Mion à « au rayonnement de Sciences Po en France et dans le monde », au même titre que Simone Veil et « autant que leurs homologues masculins ».

« Invisibilité des femmes ayant contribué à la vie de l’institution »

Mais si cette annonce peut sembler être une surprise pour certains, cela faisait plusieurs années que des personnes militaient au sein de l’institution pour pouvoir renommer un amphithéâtre en lui donnant le nom d’une femme. La mission égalité femmes/hommes de Sciences Po a créé un groupe de travail dédié à la question. L’administration a d’ailleurs admis dans la même lettre ses lacunes en matière d’égalité femmes/hommes dans les nominations de ses espaces : « Un inventaire des espaces de Sciences Po baptisés du nom d’une femme fait apparaître la quasi invisibilité des femmes ayant contribué à la vie de l’institution ».

Si beaucoup saluent la politique d’inclusion des femmes au sein de l’espace par la nomination d’amphis, il faut ajouter que ce n’est qu’une partie de la politique menée par Sciences Po en faveur de l’égalité réelle entre les hommes et les femmes. Formations, développement de nouveaux enseignements sur le genre, lutte contre le sexisme, mise en place de cellules de veille contre le harcèlement sexuel… Cette politique volontariste témoigne de l’engagement de Sciences Po pour une problématique abordée au quotidien et qui se place au centre de la réflexion générale de l’institution.

Communiqué commun de la part des membres des associations ayant participé au Groupe de Travail étudiant

( UNEF, Solidaires étudiant-e-s, l’Intersection, Garces )

L’annonce en elle-même ne nous a pas surpris dans la mesure où le Groupe de Travail étudiant s’est réuni mardi matin avec Marta DOMINGUEZ (enseignante-chercheuse et élue au Conseil Scientifique), Régine SERRA (référente égalité femmes-hommes) et Andréas ROESSNER (directeur de la vie étudiante et de la formation). RS et AR nous ont alors annoncé que les propositions de noms de 3 femmes racisées n’avaient pas été retenues par la direction. Donc forcément aucune de nous (deux représentantes de Garces, une de l’Intersection, une de Solidaires Etudiant-e-s et deux de l’UNEF) n’était satisfaite d’une telle annonce. Par contre nous ne savions pas à ce moment là ni quelles salles seraient (re)nommées ni par quels noms. Par ailleurs, nous avons exprimé à l’administration notre frustration quant au fait que les membres du groupe de travail n’ont pas été tenues au courant de l’évolution du dossier dans les dernières semaines, alors que chacune des représentantes s’est investie à hauteur de plusieurs heures par semaine durant tout le premier semestre.

Le choix de Simone Veil était pour nous assez attendu, celui de Jeannie de Clarens, que nous ne connaissions pas auparavant, a en revanche été plus surprenant. Notre démarche était fondée sur des critères visant à favoriser une représentation la plus variée possible des étudiant-e-s de Sciences Po, et nous avons ainsi pris en compte les critères non seulement d’une femme racisée, mais également de classe sociale, d’orientation sexuelle, etc. Nous regrettons que ces critères n’aient pas été plus pris en compte par l’administration dans leur réflexion quant aux noms choisis en dernière instance.

Nous avons fourni une quantité de travail considérable et beaucoup d’efforts personnels pour proposer des noms qui correspondaient aux critères susmentionnées, et le résultat n’a pu que constituer une déception certaine pour nous ainsi que pour les organisations que nous représentions.

Garces regrette que le nom de Suzanne Basdevant-Bastid n’ait pas non plus été retenu parmi les deux choix, dans la mesure où cette proposition était à l’origine du projet de féminisation des noms de lieux à Sciences Po, et que celle-ci avait reçu le soutien de la communauté étudiante grâce à la pétition du 8 mars dernier.