La réforme de reconnaissance des associations en 7 questions

 

La nouvelle procédure de reconnaissance des associations est ouverte en cette rentrée, allant de pair avec de nombreuses interrogations. La Péniche a épluché pour vous l’actuel règlement et vous en livre une version édulcorée (entendez sans ses atours purement juridiques), accompagnée des avis d’Andreas Roessner, directeur de la vie universitaire, et de deux associations aux statuts différents. Simplifiée et clarifiée, voici la réforme en 7 questions.

 1. Quels sont les nouvelles catégories d’associations ?

  • Avant, il y en avait trois sortes majeures : les associations représentatives (communément appelées syndicats étudiants), les associations permanentes (BDE, AS, Junior Consulting, Sciences Po environnement, BDA ainsi que les associations pédagogiques) et les associations reconnues par vote des étudiants.
  • Désormais, il y en a 5 : les mêmes associations permanentes et représentatives, les associations étudiantes reconnues par le Conseil de la vie étudiante et de la formation (CVEF) , après avis de la Direction en charge de la vie étudiante (DVU), les initiatives étudiantes et les autres associations étudiantes.

2. Qu’est-ce qu’une association permanente ?

Une association permanente est un groupement d’étudiants sciencespistes, et elle est instituée par le Conseil de la vie étudiante et de la formation, sur proposition de la DVU. Son statut lui permet de ne pas remettre en cause sa pérennité, d’avoir un local partagé et de disposer des services fournis par le Direction en échange de la gestion de certains services dans l’intérêt des étudiants sur un ou plusieurs campus.

3. Qu’est-ce qu’une association reconnue par le Conseil de la vie étudiante et de la formation ?

C’est une association dont l’action est tournée essentiellement vers les étudiants de Sciences Po ou les réunit pour un projet commun afin de développer la vie des campus. Elle est reconnue par le Conseil de la vie étudiante et de la formation après instruction par la DVU pour une durée allant jusqu’à la fin du semestre voyant le renouvellement intégral des représentants des étudiants de ce Conseil. Elle dispose de moyens mis en place par l’établissement pour mener à bien ses projets.

4. Comment devenir une association reconnue par le Conseil de la vie étudiante ?

L’association doit avoir déjà bénéficié de la qualité d’association reconnue ou avoir mené des actions dans le cadre des initiatives étudiantes, être déclarée en préfecture, être dirigée par une équipe d’au moins six étudiants de Sciences Po, être présidée par un ou une étudiante de Sciences Po (idem pour la fonction de trésorier) ; avoir souscrit une assurance responsabilité civile pour ses activités. Enfin ses responsables s’engagent à respecter le règlement de la vie étudiante et à suivre une formation spécifique.

 5. Et sinon, qu’est-ce qu’une initiative étudiante ?

« Les initiatives étudiantes sont des projets étudiants sélectionnés et à durée limitée portés par un ou plusieurs étudiants dans les domaines de la culture, de la connaissance, du sport, de l’environnement, de la solidarité, de la santé, de la lutte contre les discriminations et de l’engagement citoyen, cette liste n’étant pas exhaustive » (Source : règlement de la vie étudiante, juin 2016).

Elles bénéficient également de soutiens de la part de l’administration pour mener à bien leur projet.

6. Comment être sélectionné comme initiative étudiante ?

Les initiatives sont soumises à la sélection par les  étudiants eux-mêmes : chaque étudiant peut soutenir trois projets d’initiatives sur son campus. Pour être sélectionnée, une initiative doit obtenir un nombre de soutiens équivalent à 5% des étudiants d’un campus en région, 120 voix pour le campus parisien.

7. En quoi consistent les autres associations étudiantes ?

Ce sont des groupements d’étudiants n’entrant pas dans les catégories précédemment citées. Sauf disposition contraire du règlement, elles ne bénéficient pas des moyens mis à disposition pour les associations reconnues. Elles peuvent toutefois afficher librement, tracter dans les espaces commun, etc.

 


L’avis de la direction de la vie universitaire avec Andreas Roessner   


 

« Vous connaissez Sciences Po, on aime le changement »

Lorsque nous lui demandons les raisons de ce changement de procédure, la réponse fuse : « c’est très simple, la commission paritaire a décidé qu’il fallait mettre un terme à la procédure en mai 2015 ». La DVU avait donc le choix entre « la réformer ou la supprimer », et a préféré « réfléchir à ce qu’on pouvait mettre sur la table pour remplacer la procédure, faire en sorte qu’elle soit mieux adaptée ».

Il fallait en effet que les « associations deviennent plus transparentes », M. Roessner arguant que la DVU ne savait pas ce que chacune faisait. Et puis, de souligner : « vous connaissez Sciences Po, on aime le changement ! ». Celui-ci s’est fait de concert avec les principaux concernés, puisqu’il fut question de « débats et maints échanges avec les associations représentatives (syndicats étudiants)». « On a discuté avec l’UNI, surtout avec l’UNEF », le principal point de désaccord portant sur « les initiatives étudiantes et le nombre de soutiens ».

Andreas Roessner, directeur de la vie universitaire. Photo: Yann Schreiber
Andreas Roessner, directeur de la vie universitaire. Photo: Yann Schreiber

 

Petit éclaircissement sur les associations

En parlant de ces dernières, le directeur de la vie universitaire évoque les initiatives étudiantes comme étant un projet « one shot, comme un débat, une exposition… » pouvant récolter des votes à chaque semestre, et ce afin de ne pas désavantager les élèves de première année auxquels « il faut laisser du temps de se faire des amis pour monter un projet, avoir de nouvelles idées ».

Quant à ce qui se cache derrière le terme « autres associations », M. Roessner revendique être « sciemment resté flou », puisqu’il s’agit de « tout mouvement étudiant se réunissant pour une cause commune ». En d’autres termes, ce sont « des associations de fait » n’ayant « pas de personnalité juridique », mais la capacité de « demander une salle ». Enfin, quand est venu le temps d’aborder d’éventuelles nouvelles associations permanentes, le directeur rompt le débat en disant ne pas voir « qui aurait envie de polémiquer là-dessus ».

 

Quelles avancées ?

D’une part, grâce à un fonctionnement plus transparent des associations, l’aide financière le sera également. Il faut savoir qu’ « il y a deux canaux de financement : la FIA, fonds d’intervention associatif, qui peut être débloqué tout de suite à la DVU, à hauteur de 500 euros au maximum » afin de « donner un coup de pouce, typiquement financer un poste de secours, aider à la communication… ». Vous pouvez aussi solliciter « la commission de la vie étudiante » qui « instruit les dossiers disposant d’un budget équilibré ». Le financement est « validé en Conseil de la vie étudiante et de la formation », le tout dans une démarche « très transparente et ne disposant pas, a priori, de plafond ».

La DVU s’attache également à valoriser les formations des responsables et membres associatifs, notamment grâce à l’expertise de M. Thubert et les nombreux séminaires proposés à l’ensemble des étudiants. Place à « un meilleur suivi qualitatif, pour ne pas être seulement une boîte à réserver les salles et professionnaliser un peu l’ensemble ». Ce sera également l’occasion d’intensifier la campagne contre le harcèlement sexuel et les conduites à risque en milieu festif, afin de ne « surtout pas mettre ça sous le tapis ». Face à la recrudescence des cas signalés, M. Roessner insiste sur ce point, précisant que « la DVU aura forcément un volet qui traitera de la prévention des risques, c’est-à-dire comment repérer le comportement d’un éventuel agresseur, comment former les équipes organisatrices de soirées étudiantes » car « quand on est sensibilisé, on développe les bons réflexes ».

 

L’avis des associations

Deux associations ont accepté de partager leur point de vue sur la réforme. Bleu Blanc Zèbre, portée initiative étudiante, et Sciences Polémiques, souhaitant être reconnue par le CVEF.

Comment avez vous pris connaissance de la réforme ?

Bleu Blanc Zèbre : Nous avons appris qu’il y aurait un changement en recevant le mail de l’administration sur la procédure de reconnaissance des associations, début septembre. Mais le mail n’énumérait que les critères pour devenir une association, rien n’était dit sur les modalités de la procédure pour les initiatives étudiantes.

Sciences Polémiques : J’ai été averti par l’Unef au cours de l’été et l’administration nous a ensuite prévenu à la rentrée.

 Pensez-vous qu’elle sera bénéfique pour la vie associative ?

Bleu Blanc Zèbre : Nous ne pensons pas que la nouvelle procédure incite les étudiants à créer de nouvelles associations. Les associations déjà existantes ne seront plus soumises au vote des élèves, mais à ceux du conseil de la vie étudiante. Quant aux initiatives étudiantes, elles ne pourront porter qu’un seul projet, ce qui limite les perspectives des nouveaux mouvements.

Sciences Polémiques : J’ai tendance à penser que cette réforme ne changera pas grand-chose à la vie associative à Sciences Po. Celle-ci demeurera toujours aussi riche, la prime étant donnée aux associations déjà existantes et actives. Si cela réduit un peu les initiatives « loufoques » et légères, ce que l’on peut regretter, cela donne une prime aux associations les plus actives et participant le plus à la vie de l’école. En fermant la porte à certaines initiatives, la réforme tend à consolider les associations déjà en place et permet d’assurer le dynamisme inchangé à la vie étudiante. Le fait que quelques initiatives seront chaque année reconnues permet de continuer à assurer un renouvellement et de l’innovation dans ce domaine.

(A l’intention de Bleu Blanc Zèbre) : Pourquoi vous êtes-vous portés « initiative » et quel est le but de celle-ci ?

Nous souhaitons tout de même nous présenter en tant qu’initiative, car c’est pour nous le seul moyen d’exister à Sciences Po sans avoir le statut d’association. Si nous ne porterons qu’un seul projet, nous comptons bien le mener à fond, et postuler à la reconnaissance des associations l’année prochaine.

Bleu Blanc Zèbre est un do-tank qui promeut l’action citoyenne et locale, dans un cadre apartisan. Nous partons du principe que l’Etat ne peut pas tout, et qu’il faut remettre au goût du jour les initiatives portées par les citoyens eux-mêmes. Si nous n’avons pas encore voté pour le projet que nous réaliserons cette année, deux projets se distinguent particulièrement : la création de notre propre service civique et celle d’un café contact-emploi.

Quels sont les avantages et désavantages de cette nouvelle procédure ?

Bleu Blanc Zèbre : L’action des initiatives est limitée par rapport à celle des associations, qui peuvent mener à bien des projets différents. En tant qu’initiative, nous pouvons demander à Sciences Po de nous donner des fonds, de nous prêter des salles… Cependant, le grand avantage du statut d’initiative, c’est qu’il ne nécessite pas d’être une association loi 1901. Pour un mouvement naissant comme le nôtre, ça nous évite beaucoup de démarches administrative.

Sciences Polémiques : Pour les associations utilisant la nouvelle procédure, comme Sciences Polémiques, il s’agit indéniablement d’un effort en moins à faire dans l’année. Le bon coté est de s’épargner le stress d’une procédure qui n’avait selon moi pas grand sens : 24000 voix à distribuer, cela ne voulait rien dire quand une association avait juste besoin de 120 voix pour être reconnue.

La nouvelle procédure est une simple validation administrative et, si elle perd le coté séduisant et marketing des campagnes des années précédentes – qui était utile pour faire connaître des associations auprès de tous les étudiants – elle permet de nous concentrer sur nos missions respectives.

Pensez-vous, comme beaucoup l’ont avancé, que la procédure limitera la vie associative ?

Bleu Blanc Zèbre : Nous que Sciences Po n’avait pas particulièrement insisté sur le fait que seul le conseil de la vie étudiante voterait pour reconnaître les associations cette année. Quand on en parle aux étudiants, ceux qui ne sont pas engagés dans une association ne sont pas au courant. Il faudrait remettre en avant l’engagement associatif et démocratiser la procédure.

Sciences Polémiques : Cette réforme, c’est beaucoup de bruit pour rien. Je ne pense pas qu’elle aura un fort impact sur la vie étudiante de l’école. En effet, si elle signifie bien sûr qu’il sera plus difficile de créer une nouvelle initiative étudiante, son corolaire est aussi que les projets sélectionnés seront sérieux et déterminés à réussir. Or, combien de fois a-t-on pu voter dans le passé pour des associations nouvelles qui, après 3 photos de profil changées en octobre et beaucoup de promesses, ne faisaient plus rien de l’année ?

Cette réforme permettra aux associations qui font déjà vibrer la vie étudiante de perdurer et aux initiatives les plus robustes de voir le jour. Par ailleurs, les associations permanentes, Sciences Polémiques, La Péniche, Sciences Po tv… toutes les associations phares de l’école ne sont en réalité pas très affectées par la réforme et continueront, comme par le passé, à faire bouger l’institut.

 Quelles seraient vos suggestions pour améliorer la vie associative ?

Sciences Polémiques: La campagne de reconnaissance disparaissant pour une grande part des associations, il faudrait maintenant penser à organiser systématiquement au début de chaque semestre, un « forum » des associations leur permettant de faire leur promotion et de recruter non seulement des internationaux comme cela existe déjà, mais plus simplement largement tous les nouveaux étudiants.